Travailler l'oral :
Susciter l'envie et développer l'apprentissage oral d'une langue étrangère ou régionale
Dossier Numérique M1 MEEF
TD1 / TP1 : Amélie Daulé - Mathilde Duquesne - Corentin Hanane - Alan Lebreton - Jean-Michel Leroy
 

La maîtrise orale d'une langue maternelle par l'enfant s'acquiert dans son milieu. L'apprentissage n'est pas conscientisé, il se fait par imprégnation. Ceci explique en grande partie les différences entre enfants dans la maîtrise du langage, celle-ci étant fortement dépendante de facteurs environnementaux.

A contrario, l'apprentissage scolaire d'une langue étrangère s'effectue en dehors de l'environnement proche de l'enfant. Dès lors, comment optimiser l'enseignement des langues étrangères en prenant en compte les facteurs internes à l'apprenant et son environnement ?

L'usage de l'anglais s'est fortement transformé lors de la deuxième moitié du XXème siècle. En 1994, le « New London Group » qui réunit dix chercheurs aux compétences pluridisciplinaires, tente d'analyser ces transformations et ce qu'elles impliquent en partant de deux constats.

D'une part, les différents taux de natalité au sein des pays tendent à faire évoluer durablement les équilibres démographiques entre les peuples dont l'anglais est la langue maternelle au profit de l'Inde et d'autres pays du Commonwealth. D'autre part, la proportion de locuteurs non-natifs croît de façon exponentielle. Cela entraîne l'apparition de multiples sous-cultures.

En outre, avec le développement des TIC, l'association entre les différents supports audiovisuels à l'intérieur des médias créent de nouvelles formes d'usage.

En 1996, cette communauté de chercheurs publie "A Pedagogy of Multiliteracies: Designing Social Futures". Cet article propose un modèle d'enseignement des langues traduit au Québec par “Pédagogie des littératies multiples” basé sur quatre principes : “situated practice”, “critical framing”, “overt instruction” et “transformed practice”.

Il s'agit dans un premier temps de proposer des « situated practices », situations offrant un espace d'expression à l'apprenant lui permettant de verbaliser ses propres expériences. Ce modèle s’inspire du principe de “pédagogie authentique” développé par Dewey et Montessori dans la première moitié du XXème siècle. Il ne s'agit donc plus seulement d'apprendre une notion à partir d'un contexte étranger à l'apprenant mais de mobiliser ses propres souvenirs dans des situations d'apprentissage. Par exemple, plutôt que d'apprendre le vocabulaire de l'alimentation avec la recette du pudding, il s'agira pour un élève chinois de décrire son plat préféré ou mieux encore de proposer sa propre recette de pudding avec les aliments qu'il trouve habituellement dans ses placards.

L'analyse des différents choix de supports d'enseignement tend également à montrer une certaine uniformité de ces derniers. Mills (2009) suggère que l'alphabétisation de masse s'est faite en Occident au seul moyen des supports écrits à une époque où les capacités d'impression étaient concentrées en monopole. De générations en générations, le choix des supports pédagogiques n'a pas été réellement questionné, l'enseignant perpétuant consciemment ou non une forme de hiérarchie culturelle, s'éloignant de plus en plus des usages contemporains de la langue (nouvelles formes de médias, d'art, culture populaire) au profit d'une reproduction de la culture dominante. L’apparition de nouveaux médias a pourtant rendu ces usages obsolètes. Le développement et l'accélération d’internet permet la diffusion de contenus multimédias, donne la possibilité à chaque usager de publier du contenu et de s’approprier celui des autres en le commentant et en le modifiant. Ainsi, les générations actuelles et futures d’élèves perçoivent davantage le texte comme un élément d’un ensemble multimodal et s’intéressent plutôt à la forme et au contenu qu’à l’auteur. La culture du mème est une de ces formes d’expression où une image ou une vidéo courte parfois associée à un texte traduit un propos. Le “critical framing” a pour but de répondre à cela en interrogeant les notions traditionnelles de l'écriture, et les principes d'autorité, de paternité, de pouvoir et de savoir qu’elles impliquent.

L’”Overt instruction” se rapproche sur certains points du concept d’enseignement explicite. Il s’agit pour l’enseignant de fournir de façon explicite et directe aux apprenants des outils permettant la mise en relations de connaissances et de conceptualiser. Il s’agit pour l’apprenant d’identifier et de caractériser les éléments structurants d’un discours. Cope et Kalantzis évoquent la conceptualisation en tant que processus impliquant " le développement de concepts abstraits et généralisants et la synthèse théorique de ces concepts " (Cope & Kalantzis, 2015, p. 19). En utilisant ces processus de connaissance, les apprenants peuvent catégoriser les termes, et les rassembler dans les modèles mentaux. Ce modèle d’instruction peut prendre différentes formes : dessiner un diagramme, faire une carte conceptuelle ou écrire un résumé, une théorie ou une formule qui rassemble les concepts. L’objectif est d’outiller l’élève pour que celui-ci soit en capacité de prendre du recul face à la multiplicité de discours à laquelle il fait face et à la rapidité de circulation de l’information.

Enfin, la « Transformed practice » consiste à appliquer les compétences acquises par les trois processus précédemment décrits à un nouveau contexte. Cette étape est un élément essentiel du processus, elle permet de donner du sens aux apprentissages. Il s'agit de placer les élèves dans une démarche active en leur proposant des situations de problème, des travaux de production écrite ou de création artistique en relation avec ce qui a été appris.


Dans l'ensemble, ce modèle implique une transformation profonde des méthodes d'enseignement. L’objectif est d'amoindrir les différences entre élèves inhérentes au capital culturel de chacun et de fournir les outils nécessaires pour permettre aux apprenants de s'adapter aux transformations actuelles et futures dans les usages des médias. En effet, les « situated pratices » permettent aux élèves de verbaliser leurs propres expériences lors de l'entrée dans les apprentissages. Les différences culturelles qui peuvent parfois être perçues comme une contrainte deviennent ainsi un apport. Le « critical framing » permet une mise à distance par rapport aux supports et diversifie ces derniers. L' « overt instruction » outille les élèves pour pouvoir conceptualiser. Les activités faisant appel à la maîtrise de métalangages, fortement dépendantes de la culture scolaire de l'élève, sont guidées. Ainsi, les réponses à des consignes du type « décrire », « analyser », « classer », ne doivent pas dépendre de l'interprétation de l'élève mais des outils méthodologiques que l'enseignant lui fournit de façon explicite. Les supports doivent être diversifiés pour permettre à l'élève de construire son propre chemin vers la maîtrise des apprentissages et des activités pratiques doivent lui permettre de donner du sens à ses apprentissages.

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Deux courtes vidéos de présentation :
- Multiliteracies
- Conception universelle de apprentissages


Understanding multiliteracies - EAB
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Aperçu de la Conception Universelle de l'Apprentissage
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